Nos incos et Lisa Zordan A la découverte d’une illustratrice
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Avec le prix littéraire Les Incorruptibles, les élèves de l’upe2a ont lu de nombreux livres, huit romans et quatre albums formaient notre sélection. L’objectif du projet : lire ! D’abord par des lectures orales et théâtrales partagées, en explorant l’objet livre, en expliquant pourquoi on trouve un livre beau, attirant...ou pas...puis petit à petit et selon le niveau de lecture de plus en plus en autonomie avec libre choix de l’élève de lire le livre qu’il souhaite, nos lectures sont toujours liées à l’oralisation et donc au partage, lire est à la fois un acte individuel mais créateur de grands liens sociaux puisque on confronte les ressentis, les avis, on travaille sur la compréhension, en lisant on se livre...les élèves ont parfois eux-mêmes rejoué des passages de livres pour les expliquer aux autres. Chaque livre est comme une personne, une couverture comme une peau qui recueille une histoire, pour comprendre il faut creuser, aller au bout en lisant, la lecture apprend à être persévérant et à prendre le temps dans un monde de l’immédiateté, nous avons aussi beaucoup pris de temps pour faire parler les images.
Durant ce projet notre objectif était aussi d’enrichir leur parcours avenir en leur permettant de rencontrer des professionnels du monde artistique et culturel faisant partie du vaste monde du livre. Ils ont rencontré trois femmes passionnées par leur métier et qui ont su le partager avec cœur à nos élèves : une éditrice de la Maison d’éditions Talents Hauts : Justine Haré, un auteur Jo Hoestlandt pour son roman « Vue sur mer » et une illustratrice Lisa Zordan, pour l’album Rosie Pink écrit par Didier Levy aux éditions Sarbacane. Ils devaient la rencontrer le 16 mars, cela n’a pas été possible mais elle leur a répondu à distance.
Voici leurs questions et les éclaircissements de l’illustratrice :
1. Est ce que vous êtes devenue célèbre grâce à vos dessins ?
Je ne pense pas être célèbre, disons que mes dessins sont comme une vitrine qui donne de la visibilité et s’ils plaisent aux clients alors cela me donne de plus en plus de travail. Je fais ce métier avant tout pour gagner la reconnaissance des illustrateurs que j’admire et que mes livres plaisent aux lecteurs.
2. Est ce que quand vous avez lu le texte de Rosie Pink, celui ci vous a inspiré ?
Oui, j’ai tout de suite imaginé Rosie et le jardin. La nature y est omniprésente et c’est un thème que j’affectionne particulièrement alors c’est plus facile de projeter mon univers a travers un texte qui stimule mon imaginaire.
3. Est ce que vous avez un livre que vous préféré ?
Oh il y en a plus d’un. J’ai des livres qui m’accompagnent parfois même quand je pars en vacances et me servent de banque d’images pour m’inspirer. Il y a une vieille version d’ « Alice au pays des merveilles » illustrée par Nicolas Guilbert que j’ai depuis l’enfance que je garde précieusement, j’ai beaucoup de livres d’estampes japonaises qui me servent beaucoup : Hiroshige, Hokusai, Yoshitoshi ect..j’adore la bande dessinée aussi : Ludovic Debeurme, Craig Thompson, Frederik Peeters ect..et j’ai une encyclopédie sur les animaux qui me quitte rarement.
4. Quelles études avez-vous faites pour votre métier ?
Après la 3ème j’ai entamé des études de graphisme dans un lycée professionnel (lycée Corvisart situé à Paris )j’ai eu mon bac pro en 4 ans et la 5ème année je suis rentrée dans une section d’illustration ensuite je suis allée dans l’école supérieure des Arts décoratifs de Paris (ENSAD) et j’y ai eu mon diplôme en 5 ans.
5. Comment vous arrivez à imaginer les images ?
Je pense que c’est une question d’habitude. Depuis longtemps j’observe beaucoup les choses qui m’entourent, la nature, les animaux, l’environnement dans lequel je vis, les gens aussi. J’ai un répertoire visuel stocké dans ma mémoire dont je me sers pour créer mes images. Après chaque artiste à son univers propre où il glisse de temps à autres quand le travail lui permet des détails personnels dans l’image ou dans son style qui lui permette de se démarquer et d’avoir une identité graphique.
6. Comment travaillez-vous avec l’auteur ? L’éditeur ?
Parfois le texte du livre est déjà écrit donc je ne peux pas vraiment en discuter avec l’auteur ni l’éditeur. Par contre, si c’est une vraie collaboration qui part de 0, je discute avec l’auteur de mes envies, des choses que j’aimerais illustrer. Et l’éditeur et là tout au long du processus pour nous accompagner. L’éditeur à un droit de regard sur le texte et les illustrations. Il peut décider de changer une partie du texte ainsi que demander à l’illustrateur de refaire certaines images.
7. Combien du temps il vous a fallu pour illustrer cette histoire ?
Je pense qu’il me faut environ 6 mois pour un livre comme Rosie Pink. Bien sûr je travaille sur d’autres choses en parallèle, mais il me faut beaucoup de temps pour imaginer chaque illustrations, les personnages, les lieux et les ambiances pour ensuite peindre les versions finales.
8. Quel matériel avez-vous utilisé pour l’illustration ?
Je peins toujours à la gouache qui est une peinture à l’eau. Mais il m’arrive d’utiliser d’autres techniques de temps à autres pour mon travail personnel. Mais ma technique de prédilection c’est un pinceau, de belles gouaches lumineuses et parfois quelques encres colorées.
9. Quelles émotions avez-vous éprouvées en illustrant ce livre ?
Il y a plusieurs émotions qui me traversent, cela dépend de ce qu’il se passe dans l’image.
Si mon personnage est triste ou bien si je dois surtout me concentrer sur une ambiance lumineuse, je ne ressens pas les mêmes choses. J’aime beaucoup le moment ou je peins car, c’est un rituel qui m’apaise beaucoup.
Et c’est seulement une fois que je reçois le livre imprimé que je réalise le travail accompli et c’est gratifiant.
10. Pourquoi avez-vous choisi ce métier ?
J’ai très longtemps été en échec scolaire et la seule chose que j’aimais faire c’était dessiner, je n’ai pas eu mon brevet et juste après la 3ème j’ai entamé une formation dans un lycée professionnel ce qui m’a sauvé je pense.
C’était très motivant tout à coup de travailler sur des projets que je comprenais, ce-que jusque là, pendant toute ma scolarité, je ne trouvais pas, un sens à ce que je faisais et par la suite ce fut comme une évidence.
11. En quoi consiste ce métier ?
Il faut savoir mettre en valeur les textes que l’on vous donne à illustrer. Il ne s’agit pas forcement de l’illustrer mot pour mot mais plutôt de se l’approprier et de créer une image qui compléterait le texte. Parfois il faut savoir s’accorder des libertés, mais bien souvent dans l’illustration jeunesse il faut que l’image colle parfaitement aux descriptions qui sont dans le texte contrairement au dessin de presse par exemple. Sinon je travaille de chez moi comme la plupart des illustrateurs ou bien dans un atelier pour certains, donc les plus grosses contraintes c’est de savoir s’organiser et aussi d’aimer travailler seul.
12. Êtes-vous déjà venue dans un collège ?
Non jamais pour le moment, car mes livres jeunesse s’adresse « officiellement » aux primaires même si je dis souvent que mes histoires peuvent en réalité s’adresser à tout le monde et pour tout âge.
13. Est-ce que ce travail vous a amenée loin ?
Rosie Pink m’a permis de gagner en assurance et à mieux appréhender les livres futurs. Il a consolidé mon lien avec l’éditeur (les éditions Sarbacane) et la confiance qu’il peut avoir en mon travail. Et il m’a donné envie de faire d’autres livres avec Didier Levy l’auteur du livre.
14. Est-ce qu’en ce moment vous travaillez sur un livre ?
Je vais commencer un nouveau livre jeunesse avec toujours les éditions sarbacane et Didier Levy. Une histoire de nature sur la lignée des deux précédents, Rosie Pink et La dame aux oiseaux.
15. Vous rappelez vous de votre premier livre illustré ?
Oui bien sûr, j’étais encore étudiante et en 2ème année des arts décoratifs. Mon professeur et illustrateur Laurent Corvaisier n’avait pas le temps de réaliser un projet alors il m’a proposé à l’éditeur à sa place. J’étais ravie car il s’agissait des aventures de Tom Sawyer. Ce fut difficile comme travail avec un délai très court, mais même si j’ai changé de style aujourd’hui je ne regrette pas cette expérience.
16. Quelles études pour devenir illustratrice ?
Je ne sais pas s’il existe vraiment une formule pour devenir illustrateur. Disons que les grandes écoles comme les Arts Décoratifs de Paris permettent d’expérimenter différentes méthodes et techniques qui vont enrichir notre vocabulaire graphique. L’école stimule notre curiosité même si elle doit être déjà présente au départ. Voir ce qu’il se fait ailleurs et nourrir son imaginaire du monde qui nous entoure est important. Ça peut être par le biais du cinéma, de la musique, ou encore de la littérature et cela on ne l’apprend pas systématiquement à l’école. Il existe des prépa qui préparent aux grandes écoles, mais chaque parcours est différent.
17. Quand vous terminez les dessins d’un livre vous faites quoi après ?
Je m’accorde un petit temps de repos quand c’est possible. À chaque fin de livre j’éprouve deux sentiments ambivalents, la joie d’avoir enfin terminé et un peu de peine aussi de réaliser que le livre est fini. C’est comme dire au revoir à une histoire et des personnages qui m’ont accompagné pendant plusieurs mois.
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Chers élèves du collège venez au CDI à la rentrée découvrir cet album qui parle aux petits et aux grands : "Rosie Pink" dans le cœur de ce jardin se déroule une bien grande histoire, celle de l’ouverture au regard d’autrui et de l’accomplissement de soi d’une petite fille sage, mais mutine qui va bouleverser le monde bien réglé de son père.